Par Nicolas Heidet
Après des années d’attente, Alfa Romeo amorce enfin ce qui ressemble à un vrai tournant. Une renaissance presque nécessaire tant la marque italienne s’était laissée distancer par la concurrence, enchaînant les années sans réelles nouveautés. Si la Giulia et le Stelvio avaient redonné espoir aux passionnés, ils n’ont pas réussi à s’imposer face aux contraintes du marché : malus écologique élevé, technologies vieillissantes, et positionnement tarifaire peu en phase avec la demande. Le Tonale, bien que plus accessible, démarre encore à près de 40 000 euros. Trop haut pour prétendre séduire une large clientèle, laquelle a qui plus est sorti la marque de ses radars depuis trop longtemps.
C’est dans ce contexte que débarque le Junior, un SUV compact pensé avant tout pour le marché européen, et plus particulièrement français, où les Renault Captur, Peugeot 2008 ou autres Volkswagen T-Cross règnent en maîtres. Mais Alfa Romeo n’a pas l’intention de se mêler à la piétaille : son terrain de chasse, ce sont les Audi Q2 ou Lexus LBX. Et le démarrage semble prometteur : avec près de 1 500 unités écoulées en France au premier trimestre, le Junior s’offre une entrée en matière encourageante. Son prix ? Il démarre à 35 500 euros en version Ibrida.
Un design à part, fidèle à l’ADN Alfa
Reposant sur la même base technique que les Jeep Avenger et Fiat 600, le Junior se distingue néanmoins par une identité visuelle forte. Là où d’autres multiplient les compromis stylistiques, Alfa assume un design affirmé, sportif, immédiatement reconnaissable. La série spéciale « Intense » illustre parfaitement cette ambition : jantes noires et or, sellerie en alcantara noir rehaussée de cuir surpiqué, ambiance intérieure marquée par une vraie volonté de différenciation. C’est chic, distinctif et résolument premium.
Cependant, tout n’est pas parfait. À bord, certains détails trahissent un peu trop l’appartenance au groupe Stellantis. Le sélecteur de vitesse ou l’interface multimédia d’inspiration Citroën font (grosse) tache dans une Alfa Romeo, rappelant de douloureux souvenirs d’économies mal placées dans l’industrie (qui se souvient du commodo de Fiat Tipo dans une Ferrari ?). Si les temps ont changé, et que ces partages sont aujourd’hui plus discrets, ils restent parfois perceptibles, surtout dans une voiture censée incarner le haut de gamme latin.
Hybride ou électrique : laquelle choisir ?
Lors de notre essai, nous avons pris le volant des deux motorisations proposées sur le Junior : hybride et 100 % électrique. Direction la région parisienne, puis quelques routes secondaires bien connues de nos essais plus sportifs, sans oublier un petit détour par Dreux – non pas pour un tour de circuit, mais pour tester la polyvalence du Junior en conditions variées.
La version hybride, équipée d’un petit trois cylindres couplé à un moteur électrique pour un total de 145 ch, s’est montrée particulièrement à l’aise. La direction n’est pas chirurgicale, mais suffisante. La tenue de route est rassurante, l’amortissement soigné. Le Junior hybride brille surtout par sa facilité de prise en main et son confort, sans jamais verser dans la mollesse. On regrettera juste une consommation légèrement supérieure à celle de certains concurrents (6,5 l/100 km en conduite dynamique), mais rien de rédhibitoire.
Le passage à l’électrique change un peu la donne. Notre version de 156 ch ne se distingue pas vraiment en termes de performances pures face à l’hybride. Ce qui saute aux yeux, ou plutôt dans les bras, c’est une direction plus lourde à basse vitesse et un comportement dynamique dégradé. Le surplus de poids – environ 300 kg supplémentaires – se ressent dans chaque virage : plus de roulis, moins de précision, un confort plus ferme. Sur route sinueuse, le charme opère un peu moins.
Verdict : une préférence assumée
Ce Junior est une belle surprise et, surtout, un vrai retour aux affaires pour Alfa Romeo dans un segment stratégique. Le style est réussi, l’habitacle flatteur, et la version hybride constitue, à ce stade, le meilleur compromis. La variante 100 % électrique, si elle conserve son intérêt pour certains usages, pâtit d’un surpoids mal digéré. Reste la version Veloce forte de 280 ch, encore à découvrir. Mais là, on entre dans une autre catégorie… et un autre budget.
Photos : Alfa Romeo